PAUL-JEAN TOULET (1867 - 1920)                                    par Jacques LE GALL

 

Parle tout bas, si c’est d’amour,

 

Au bord des tombes

 

 

Paul-Jean TOULET

 

Quand vous êtes sortie de chez moi, j’ai vu votre ombre passer sur mes rideaux. Ainsi tout bonheur est une ombre, et le plaisir aussi une ombre ; et même les songes, qui sont le meilleur de la vie.

 

Conçu à l’île Maurice, né à Pau en 1867, Paul-Jean Toulet s’est toujours présenté comme «pur Béarnais, et moitié créole ». Mais du Béarn « aux belles pierres » et de la «douce plage » mauricienne, « ce jeune dieu, à la couleur de miel » (ainsi le décrit Jammes) ne sut retenir que la « grâce évanouie » de bonheurs passés. À la poursuite du « fuyant plaisir de vivre », il voyagea et chercha quelque tanière où se réfugier. Or, ni les nuits d’Alger ou de Paris, ni les brumes de Londres ou tel soir d’ivresse « stendhalienne » en Espagne, ni le lointain Tonkin ou le « fer changeant » d’un château girondin où on le maria ne guérirent une blessure première : l’enfant avait perdu sa mère alors qu’il n’avait que quelques jours.

 

C’est sur la Côte basque, à Guéthary, que le dandy désenchanté s’échoua et mourut, âgé de cinquante-trois ans. Ce « grand loup maigre » avait vécu affamé d’alcools forts et de jolies femmes, de drogues et de livres, d’art et de poésie, de paysages. Son cœur était sans doute «moins coriace » qu’il y paraissait, mais il n’aura trouvé pour se défendre que les songes, («qui sont le meilleur de la vie »), l’ironie (« arme à deux tranchants où l’on blesse moins les autres que soi-même ») et l’écriture (sans doute « avait-il gardé assez de candeur pour être poète »).

 

Ses écrits ? Des bouts de romans décolletés que Willy signait le plus souvent, des chroniques journalistiques et notes critiques sur l’art ou la littérature, deux ou trois pièces de théâtre et un livret d’opéra resté inédit, un embryon de Journal, des traductions, des lettres étincelantes, des nouvelles et des contes, des madrigaux et des paperolles, des épigrammes et des oarystis, des romans, des pensées d’un « scepticisme aéré », des «vers trouvés sur un mirliton» et des vers ciselés.

 

Ce qui, « certains jours », a écrit Jorge Luis Borges, fait de Toulet « le plus grand poète français, même si tout le monde l’a oublié », c’est le style et c’est le mystère. Le style des cinglants aphorismes colligés dans Le Carnet de Monsieur du Paur et Les Trois Impostures ; le style des Chansons, Dixains, Coples et de soixante-dix Contrerimes posthumes mais parfaites. Le mystère d’une voix qui parle tout bas pour dire ce qui fut et fuit, l’amertume de la beauté, l’entremêlement de l’amour et de la mort ; le mystère de sa vie, de la vie…

 

Si vivre est un devoir, quand je l’aurai bâclé,

Que mon linceul au moins me serve de mystère.

Il faut savoir mourir, Faustine, et puis se taire :

 

Mourir comme Gilbert en avalant sa clé.

 

Œuvres de Paul-Jean Toulet et publications posthumes

 

1898 Monsieur du Paur homme public

1901 Le Grand Dieu Pan (traduction)

1902 Le Mariage de don Quichotte

1904 Les Tendres ménages

1905 Mon Amie Nane

1918  Comme une fantaisie

1920 La Jeune Fille verte

1920 Les Contes de Béhanzigue

 

1921 Les Contrerimes

1922 Le Souper interrompu

       Les Trois impostures, Almanach

       Correspondance avec un ami pendant la guerre

1923 Les Demoiselles La Mortagne

1924 Notes d'Art

        Lettres à madame Bulteau

1925 Quatre contes

1926 Notes de littérature

1927 Le Carnet de Monsieur du Paur

       Lettres à soi-même

       Un conte et des histoires

       Conseil à un filleul

1929 Correspondance de Claude Debussy et P-J Toulet

1934 Journal et Voyages

1936 Vers inédits

1949 Nostalgies

1955 Lettres de Paul-Jean Toulet à Henri de Régnier

1959 Lettres de Paul-Jean Toulet à Emile Henriot

 

 

Jacques Le Gall

Ancien maître de conférences en langue et littérature françaises à l’université de Pau et des Pays de l’Adour. 

Travaux sur le roman (thèse sur Jean Giono) et la poésie : une dizaine de livres et près de 200 articles parus dans diverses revues.

Livres sur des poètes pyrénéens ou qui ont entretenu des relations avec les Pyrénées : Jules Supervielle, Francis Jammes, Paul-Jean Toulet et, tout récemment, Georges Saint-Clair.

Passionné de montagne. Membre du comité de rédaction de la revue Pyrénées.

Secrétaire de l’Association des Amis de Pierre Michon.

 

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